Vainqueurs et perdants

L'éternel combat de l'homme dans le sens précité ne lui procure, au cours de sa vie, aucune modification précieuse, d'où pourraient résulter l'amour, la paix intérieure, et la liberté intérieure, l'harmonie et l'équilibre. Et de tout temps déjà ces luttes n'ont apporté aucun progrès véritable et précieux à l'homme. Les hommes ne sont pas parvenus au bonheur à la suite de ces luttes, et n'ont pas non plus donné naissance, ainsi, à un véritable progrès, sans même parler d'une évolution précieuse qui en serait résultée. Par ces luttes, il n'y a eu, de mémoire d'homme, que des adversaires qui se sont opposés, des hommes qui, d'une certaine manière, se sont confrontés d'une manière agressive, et qui, des deux côtés, sont devenus des perdants.

Si l'on fait appel à des dons, pour les victimes de l'arbitraire des despotes, contre la faim ou pour les victimes des séismes et des inondations, etc. alors on met tout de suite en oeuvre une lutte de solidarité conduisant à des dons par millions. Mais en règle générale, les dons ne sont faits que pour permettre aux gens aisés et aux riches, d'une part, de démontrer ouvertement leurs "devoirs envers leurs semblables" et les respecter d'une façon hypocrite, pour paraître, et d'autre part, de se libérer de leurs sentiments de culpabilité envers les plus pauvres et ceux qui ne possèdent rien. En réalité, donc, tout cela n'est que de l'hypocrisie, pour se considérer comme des bienfaiteurs et des vainqueurs, par rapport à ceux qui, en tant que personnes en détresse, sont les perdants de la société et de l'humanité. Il s'agit là de la forme d'une conflagration mondiale, qui ne connaît effectivement que des perdants, car chaque centime alloué comme don, par fausse pitié et par sentiment de culpabilité, est un centime pour la perte de sa propre dignité et respect, ce qui fait que les donateurs se font eux-mêmes perdants par rapport aux perdants et le prouvent par leurs dons. Tout cela, contrairement aux hommes véritables, pour lesquels la serviabilité envers les semblables en détresse constitue un devoir quotidien et naturel, qu'ils accomplissent par amour et par véritable humanité, de leur propre initiative et de leur propre appréciation, sans y être appelés ou sollicités.Si, à l'opposé, la bataille de la compassion est terminée pour les donateurs et donatrices, sollicités par la mendicité et priés de passer à la caisse, et si elle est tarie dans la mémoire des hommes, alors on ne gaspillera plus aucune pensée pour les nécessiteux - et pourquoi en serait-il ainsi, car les nécessiteux et personnes en détresse ne sont, en fait, que des perdants, envers lesquels les "nobles" donateurs se considèrent comme de glorieux vainqueurs. Mais combien douteuse est cette victoire. De fait, les personnes en détresse continuent à végéter, mais c'est à dessein qu'elles sont oubliées, car avec les dons des centimes de compassion, le sentiment du devoir accompli aura été satisfait, les bénéficiaires des dons devant se débrouiller eux-mêmes avec leurs faux espoirs. Et, n'est-ce pas ainsi - on recueille beaucoup de dons pour les personnes en détresse, qui sont alors empochés, en grande partie, par les organisations humanitaires elles-mêmes, pour leurs frais de gestion, etc..

Toujours et toujours à nouveau, on prétend lutter pour la paix dans le monde, créer l'amour et l'harmonie dans la famille et entre les hommes, se soucier de la véritable liberté de l'humanité. A cet effet, on lance des appels qui coûtent des millions, et à cet effet, on organise des manifestations de masse, avec des cortèges humains s'étendant sur des kilomètres - on tient des bougies allumées dans les mains, pour créer des chaînes de lumière, qui doivent symboliser l'amour, l'harmonie, la paix et la liberté.